Hommage à Albert Memmi

 

Albert Memmi

Albert Memmi est décédé dans la nuit du jeudi au vendredi 22 mai.

C’était un écrivain, c’était un sociologue, c’était un philosophe, c’était un humaniste .

Albert Memmi avait compris très tôt qu’il était important d’expliquer la nature de l’homme dans le contexte social où il évoluait avec l’idée extraordinaire que tout un chacun pouvait se restructurer , réinventer sa vie tout en continuant à se battre pour ses idées.

L’homme qui écrivait la Statue de sel et Agar essayait de sortir d’un univers qu’il chérissait mais en même temps qu’il voulait dépasser.

Son engagement contre toute espèce de violence contre l’humain ,dans son livre le Portrait du colonisé , préfacé par Jean Paul Sartre , était exemplaire dans la description socio historique de ce dramatique moment de l’histoire humaine.

Il ne s’est cependant pas limité à parler de lui-même et de son histoire personnelle comme un exemple de résilience, il a également essayé de décrire très finement les mécanismes de l’oppression qu’elles soient coloniales ou autres , tout en expliquant par la même, qu’il fallait aussi se sortir du piège, du trauma, du ressentiment pour pouvoir se reconstruire, se réinventer.

C’était également un homme que la psychologie intéressait beaucoup et son travail autour de la dépendance est un bel exemple de l’importance de l’impact des déterminants sociaux sur la personnalité du sujet. Il ne psychiatrisait pas la problématique, il en décrivait la complexité de ce qui rend le sujet dépendant.

Évidemment on ne peut oublier le travail immense contre le racisme et son livre ,véritablement ,va jusqu’au fond du sujet et montre combien la stigmatisation et la recherche de bouc émissaire est un drame social, psychologique et philosophique.

C’était une écrivain dont l’élan vital était puissant. Il s’intéressait à tout ce qui rend l’humain fragile.

Il interrogeait l’avenir, il interrogeait le présent, il tenait à prendre pour témoin le passé ,mais pas seulement pour une auto réflexion, mais pour partager ses anxiétés avec l’autre. Il restera dans notre mémoire comme un humaniste courageux, optimiste sans excès, avec toujours en arrière-plan une dimension altruiste dans l’approche phénoménologique du sujet.

Nous n’oublierons pas ni l’homme ni son œuvre immense .Il aura su interpeler tout un chacun d’entre nous, autant les chercheurs que les cliniciens sur la dimension socio culturelle dans la construction de soi et du respect de l’autre.

Tous les membres de l’Association Française de Psychiatrie Sociale se joignent à moi pour présenter nos sincères condoléances à sa famille et à tous ses proches.

 

Rachid Bennegadi

President de l’Association Française de Psychiatrie Sociale

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